Légende photo : Murailler au travial - Réalisation : Albert Porri, Var (83)
La Fédération française des professionnels de la pierre sèche (FFPPS) est fondée en 2012 (cf. AG constitutive) à la demande du Ministère de l’écologie, de l'énergie et du développement durable afin de formaliser le rassemblement des acteurs de la pierre sèche engagé suite au programme REPPIS (Réseau européen des pays de la pierre sèche 1996-1999).
Ce réseau constitue aujourd’hui un véritable carrefour des acteurs de la filière professionnelle : des artisans et associations d’artisans muraillers, caladeurs et lauziers bien sûr, mais aussi des carriers, des architectes, des paysagistes-concepteurs, des bureaux d’études, des acteurs publics (collectivités, PNR, CAUE,…), des ingénieurs et enseignants-chercheurs du BTP, des archéologues, des naturalistes, des entreprises de paysage, des vignerons, des centres de formation professionnelle, des associations du patrimoine, des structures d’insertion
C’est un collectif de passionnés, réunis par l'intelligence et la beauté et d'une technique qui façonne les paysages depuis des millénaires, qui ont su mutualiser leurs compétences, leurs énergies et leur passion au service de la pierre sèche.
La FFPPS se donne pour mission de développer, structurer et animer son réseau des acteurs de la pierre sèche du niveau local au national, de promouvoir ce système constructif auprès des acteurs publics et privés de l’aménagement du territoire (génie civil, BTP, environnement, paysage, agriculture, eaux, forêt…), d'accompagner le développement de la filière professionnelle, de contribuer à la formation et la montée en compétences des acteurs, d'améliorer la connaissance des savoir-faire liés à la pierre sèche.
Lorsque nous avons démarré l’aventure, le métier n’existait quasi plus.
Il faut replacer le sujet dans son époque. Fin des années 90, la pierre sèche était encore cataloguée dans le registre restreint du patrimoine vernaculaire et d'études anthropologiques et archéologiques. Elle n'était enseignée dans aucune école. Il s'agissait de chantiers de bénévoles ou d'insertion qui oeuvraient majoritairement pour inventorier et restaurer des cabanes. Par conséquent, pourquoi former les artisans à la pierre sèche alors que le marché n'existait pas et que le métier n'existait plus ?
A notre époque régie par des codes et des normes, un mode constructif n'existe que s'il a des règles écrites et validées officiellement. Là, la technique était considérée comme obsolète, comme pratique du "pauvre", le "riche" pouvant prétendre à des techniques conventionnelles, industrielles, modernes et rassurantes.
Sans écrit aucune assurabilité des travaux, ni pour les entreprises, ni pour les architectes. Par conséquent, aucune commande publique possible.
Sans écrit, par méconnaissance, soit les profils des ouvrages étaient surdimensionnés et par conséquent, plus de matière première générait plus d'heure de mise en œuvre d’où des devis prohibitifs, soit les ouvrages étaient bâti avec plein de bonne volonté mais ceux-ci s’écroulaient et alimentaient les détracteurs de la pierre sèche. Nous entendions souvent: « La pierre sèche ça ne tient pas, on ne peut faire que de petits murs qu’il faudra reconstruire après l’orage» => Deux préjugés rédhibitoires majeurs qu’il nous a fallu combattre.
Il nous fallait à la fois faire admettre le mode constructif, faire reconnaitre le savoir-faire et garantir la qualité de transmission pour enfin promouvoir la pierre sèche comme une maçonnerie pertinente face aux enjeux de Développement Durable.
En reliant la chaîne des savoirs, praticiens, chercheurs, prescripteurs, maitres d'ouvrage, cette démarche est le fruit d’une longue coopération pour produire les outils indispensables à l'émergence d'une filière économique à l'échelle nationale.
Suite au programme européen REPPIS (Réseau européen des pays de la pierre sèche 1996-1999) piloté par l’Agence Paysages d'Avignon et codirigé par l’Association pour la participation et l'action régionale (APARE) et le Parc naturel régional du Luberon:
"Au travers des murs de terrasses de culture et des cabanes appellées bories, la pierre sèche est une caractéristique forte des paysages du Luberon. Si les murs de soutènement des routes sont moins nombreux qu'à Mallorca, ils sont tout de même abandonnés au profit d'ouvrages de béton dont la technique maîtrisée leur confère un avantage sur une pratiques ancestrale...L'opération pilote consiste, en partenariat avec le corps des ingénieurs des travaux publics, à la mise en place d'un laboratoire des ouvrages de soutènement en pierre sèche permettant leur dimensionnement. Ce site témoin se trouve au coeur du village de Bonnieux." Didier Respaud-Bouny, Agence Paysages, coordinateur REPPIS
C'est à Bonnieux que Denis Tessaro et Paul Arnault, entreprise OPUS, engagent les premières expérimentations sur la stabilité des soutènements en pierre sèche avec Jean-Claude Morel et Boris Villemus de l'ENTPE de Lyon. C'est lors du workshop de REPPIS en Luberon, où la Chambre de Métiers et de l'artisanat de Vaucluse et le Parc national des Cévennes furent conviés, que Claire Cornu rencontre Didier Lecuyer, Paul Arnault et Jean-Claude Morel.
©Claire Cornu : photo de gauche Denis TESSARO lors du workshop de Bonnieux (printemps 1999)/ photo du centre démonstration devant les participants au colloque (idem) / photo de droite affiche du workshop de Palma de Mallorca (automne 1999)
2 indicateurs ont guidés la démarche de la Chambre de métiers et de l'artisanat de Vaucluse en 1999:
Partant de ce constat, Claire Cornu de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Vaucluse mobilise plusieurs entreprises artisanales issues de différents territoires et oeuvrant sur différents types de pierre. Didier Lecuyer lui donne son appui pour les Cévennes. A partir de là, des praticiens vont confronter leurs pratiques et partager leurs savoir-faire, à la fois entre eux, mais aussi avec celui des chercheurs, piloté par Jean-Claude Morel de l'ENTPE de Lyon. Cette mutualisation est une démarche exemplaire. Elle s’inscrit dans l’avenir du secteur de la construction qui passe aussi par d’autres comportements, d’autres réponses constructives que la construction conventionnelle, pour un développement durable des territoires.
Une convention (2000-2004) est établie entre la Région Provence Alpes Côte d'Azur et la Chambre de métiers et de l'artisanat de Vaucluse (CMA84) pour étudier la faisabilité d'une filière professionnelle nationale, suivie (2003-2006) d'une commande pour la rédaction d'un guide de bonnes pratiques, conjointe de la Direction du commerce de l’artisanat, des services et des professions libérales du ministère (DCASPL), Suzanne Lacombe-Fievet, et de la Confédération artisanale des petites entreprises du bâtiment (CAPEB): Robert Fierret de l'Hérault (34), Yves Marchand de Vaucluse(84) et André Mollard de Savoie (73).
La coopération s'engage en 2001 avec les scientifiques, saluée par Le Moniteur le 8 avril 2002 :
Ces programmes n’ont été possibles que grâce au savoir d’artisans militants: Les Muraillers de Provence et Artisans Bâtisseurs en Pierres Sèches des Cévennes. Ils ont donné de leur temps et ont mutualisés leur énergie pour faire aboutir ces recherches. A partir de 2005, s’est jointe à eux la Confrérie des bâtisseurs en pierre sèche du Gard. Solidaires et unis, chacun faisant sa part pour relever ce challenge, ils ont ainsi produit collégialement :
D’autres programmes en Europe démontrent les valeurs de ces maçonneries en pierre sèche:
Désormais, artisans, scientifiques, institutions professionnelles et territoires d’Europe partagent expériences et résultats pour prouver que la pierre sèche agit sur les 3 piliers du développement durable. Pour les territoires ayant une tradition de pierre sèche, il apparaît opportun de les éclairer sur cette technique traditionnelle qui entre en résonance avec les préoccupations du Grenelle de l'Environnement. Le recours à une technique conventionnelle "béton décor pierre sèche" n'est ni utile pour la fiabilité de l'ouvrage, ni souhaitable pour une démarche environnementale. Pour les métiers, cette technique de pierre sèche est porteuse de sens et valorise le savoir faire de murailler.
Des distinctions successives obtenues à l'initiative de la Chambre de métiers et de l'artisanat de Vaucluse:
20 janvier : sur demande de Jean-Michel Grosselin, Chargé de mission filière verte pour la construction au Ministère de l'écologie, qui appelait à formaliser le collectif, et assisté de l’Institut de recherche et de formation aux métiers de la pierre de l'Association ouvrière des Compagnons du Devoir et du Tour de France (AOCDTF), à Rodez (12), Raymond Bastide et Olivier Campistron, la Fédération française des professionnels de la pierre sèche (FFPPS) est fondée en Avignon par :
Voir l'AG constitutive de la FFPPS et le schéma de fonctionnement.
"L’association existe depuis janvier 2012 mais pour moi, même si notre aventure humaine ne portait pas de nom, nous étions soudés depuis longtemps par la confiance et le bonheur de produire ensemble. Dès 2002, nous avions décidé d’une stratégie collective, chacun prenant à charge une mission pour alimenter le pot commun... Bref, c’est au printemps 2011 à la réunion du Réseau Rural Français au ministère de l'Agriculture où Régis Ambroise nous avait introduit, que Jean-Michel GROSSELIN du ministère de l’écologie, Développement Durable et de l’énergie, nous a demandé de formaliser notre collectif pour pouvoir nous apporter un soutien financier. Alors on a franchi le pas, entre les 3 associations de muraillers, les 3 laboratoires de recherche et nos fidèles institutions le Parc national des Cévennes et la CMA84. Jean-Michel GROSSELIN puis Guillaume DEROMBISE, nous ont accordé leur confiance pour conduire la diffusion des outils, le transfert du savoir auprès des prescripteurs et promouvoir la pierre sèche auprès de territoires où nous n’étions pas encore intervenus." Paul Arnault, Président fondateur de la FFPPS de 2012 à 2018.